vendredi 24 juillet 2015

"Qui a peur de l'obésité ?" 1er épisode : Le commerce des régimes par Catherine Grangeard

Ce texte est le premier volet d'une série consacrée à l'obésité. 

Il a été écrit par Catherine Grangeard, psychanalyste qui s'intéresse depuis longtemps à la question.
(Elle précise "d'où elle parle" après l'article, dans les commentaires. )

Le volet 2, rédigé par Marc Zaffran/Martin Winckler, sera consacré à la maltraitance des personnes en surpoids. 

Nous espérons que ces textes susciteront réactions, commentaires et - pourquoi pas ? - de nouvelles contributions. 

MW 
*****


The Journal of the American Medical Association (JAMA) publie le 2/01/2013 l’analyse des données d’une analyse d’une centaine d’études regroupant 2,88 millions de personnes. C’est du lourd, du sérieux. Conclusion : un surpoids modéré peut favoriser la longévité. 

L’examen du risque de décès, quelle que soit la cause met en évidence une réduction de 6% pour les personnes en surpoids (IMC entre 25 et 30) par rapport à celles à IMC dit normal (18,5 à 25).

Katherine Flegal montre aussi qu’une réduction de 5% demeure pour celles qui ont un IMC de 30 à 35, qui sont donc en obésité modérée par rapport aux personnes en IMC normal…

L’obésité massive est accompagnée de comorbidités, statistiquement il y a surmortalité. Maispas le surpoids…

Notre surprise ne s’arrête pas là. Les conclusions de cette étude portant sur près de 3 millions de personnes (excusez du peu !), financée sur des fonds publics avec des auteurs qui ne déclarent aucun conflits d’intérêts, eh bien, ces conclusions ne sont pas inédites… elles sont cohérentes avec 2 études précédentes (2005, 2007).

Mais, alors direz-vous ? 10 ans après on croit pourtant lire un scoop.
Cherchez l’erreur…
OK, cherchons ensemble.

A qui profite le crime ? Les enquêteurs posent cette question pour démarrer.
Pas aux personnes qui s’escriment à perdre des kilos qu’elles estiment en trop pour atteindre l’IMC dit normal. Ça leur coûte, à tous niveaux.

Humainement, que d’efforts pour se contraindre à un autre poids que celui vers lequel elles tendraient naturellement mais qui a été décrété comme trop important. Par qui, pourquoi… On croyait que c’était pour être en pleine forme et vivre longtemps. Mais, non… Katherine Flegal montre, 2,88 millions de personnes à l’appui, qu’il n’en est rien.

Mais que fait la police ? (pardon, les médecins). Pourquoi se serre-t-on la ceinture ? Ou plus exactement pourquoi introduire dans les esprits cette conviction qu’hors la minceur, pas de salut ?

Cette méga-analyse est bien peu diffusée alors que tant de médecins-stars occupent les écrans. Pourquoi cet assourdissant silence ?

Le Professeur Patrick Tounian avançait une hypothèse sur « la ribambelle de réactions négatives, notamment de ceux qui vivent de l’obésité et ont intérêt à ce que leur gagne-pain ne soit pas relativisé et soit considéré comme un terrible fléau ».

Qu’en dit Hippocrate ? Il se retourne dans sa tombe une fois encore.

Examinons alors la fabrication de l’obésité.
Présentée comme un fléau, la peur du siècle, un conditionnement façonne les populations. Si quelques kilos s'installent, il s’agit de les faire disparaître.

Se surveiller… et s’empêcher.

Les sociétés occidentales vivent dans l’abondance de nourriture, les publicités invitent à consommer en permanence, au- dessus de ses moyens… Mais les modèles qui sont utilisés, les top models, n’ont sans doute pas ce mode de vie. Leurs corps sont minces, très, très minces même.

Ces injonctions paradoxales sont sources de stress. Le stress appelle les compensations. Au secours !

Heureusement, le système est si bien fait… Les régimes fleurissent de partout. Coaching, est leur nouvelle dénomination.

En novembre 2010, le rapport de l’ANSES accable tous les régimes, quels qu’ils soient, et il prouve leur inutilité. Et leur nocivité. A 5 ans, 95% sont des échecs. Tous les kilos perdus ont été repris, avec un bonus plus ou moins légers selon les personnes.

Pratiquer le yoyo mène à l’obésité !

Plutôt que mettre en corrélation les résultats de ce rapport et la méga-analyse, sur près de 3 millions de personnes, le marché minceur a pratiqué la politique de l’édredon. Etouffer ce qui pourrait sonner l’arrêt du jeu.

Car tout cela rapporte gros… Près de 4 milliards d’euros en France, par an !
Le titre « Les marchés de la minceur, horizon 2016. Vers un écosystème numérique et interconnecté »  (étude vendue plus de 2000 euros pour une version papier et atteignant 5000 euros si la diffusion se fait au sein de votre entreprise…par Precepta, groupe Xerfi) indique la tendance…

Voyons donc les sites minceur, puisque c’est de ce côté que se situe l’horizon.
Centrons même notre viseur sur les sites des médecins. Sont-ils encore médecins ou uniquement commerçants ?

Un article tout neuf (Capital, 17 juillet 2015) est fascinant ! Sur fond d’embrouilles entre (je cite toujours) Dukan, le roi du régime et Simoncini, le pape de la rencontre sur Internet (ancien patron de Meetic). En 2007, ils s’associent pour créer Régime coach, société de coaching minceur comme son nom l’indique clairement, régime et coaching c’est du pareil au même… Succès fulgurant, 18 millions de CA en 2010. Ensuite, l’embrouille, mais ça ne nous intéresse pas vraiment ici. Comme dans tout polar qui se respecte, l’intrigue est tordue. Diet Mafia blues…

Si cette histoire est ici relatée, c’est pour d’autres raisons. Déjà, fournir un ordre d’idées du rapport financier. Et, le célèbre ex-docteur Dukan n’est pas le seul à vendre du coaching minceur en ligne. Le Docteur a fait des petits…
Le massacre est de masse, alors ça se complique…

Soit on demande au Conseil de l’Ordre de jeter un œil vers l’horizon et de faire respecter un peu d’Ordre. Soit, on ne s’intéresse pas seulement aux cas individuels des Dr A, C, … Z… et on se tourne vers le Ministère de tutelle, le Ministère de la Santé. (Pourquoi, « soit », l’un exclut l’autre ?)
Une expertise s’imposerait peut-être …
Pire que la canicule, cette affaire !

La sécurité routière fait diminuer les morts sur la route en limitant la vitesse, en contrôlant l’alcool au volant… et que sais-je, en distribuant les bons points du permis, en faisant appliquer le Code de la route.
Pourquoi pas un Code des sites minceur ?
Ah, parce que ça n’existe pas ?
Ben, non. Rien.

Vous vous frottez les yeux ? D’autres, c’est les mains… les petits malins. Oui, les 29 euros mensuels que vous coûtent ces formules, ces petits programmes rebaptisés coaching… ça se chiffre en millions d’euros au final !

Tout cela parce que la peur de grossir a été vendue comme la peur du siècle !
C’est comique. C’est tragique.
Oui, pourquoi acheter la poudre de perlimpinpin ou les formules A… C… Z ?
La peur de ne pas être aimé-e.

Parce que c’est la peur de l’humanité. Rappel : tout bébé arrive sur terre incapable de se débrouiller tout seul. Il est dépendant du bon vouloir de l’autre pour le nourrir, le tenir propre, à la bonne température, le protéger, lui permettre de se reposer, lui assurer son bien- être, sa sérénité, sa sécurité, etc… TOUT.

La dépendance a cette origine.
La peur de ne pas être aimé, d’être maltraité, abandonné, … est enracinée dans cette réalité humaine d’arriver sur terre en ayant besoin de l’autre pour survivre.
Ainsi, créer une adéquation entre cette peur ontologique et le fait que pour être désirable, il faut avoir tel corps, est ……….. grave.

Ce n’est peut-être pas un total hasard que les médecins se doivent d’avoir une certaine éthique, une éthique certaine. Science sans conscience, etc…
Faire du commerce est-ce préjudiciable ?
En soi, certes non.
La confusion des genres en revanche, oui.

Notre enquête avance à grand pas finalement.
Les sites minceur prospèrent dans un vide juridique total. C’est impensable alors que l’horizon est indiqué de ce côté. Visiblement à juste titre, vu le CA indiqué par la revue Capital.

La casse du côté des gens qui s’adonnent à ces coachings est catastrophique.
Pour le moment, l’auto évaluation des sites par eux-mêmes n’a aucune fiabilité. Pour le moment, une personne se rendant une fois sur le site, sans même s’inscrire à un programme se voit relancée et pas n’importe quand… A des dates clés, Noël, début janvier pour les bonnes résolutions de l’année nouvelle, à la St Valentin, à la fête des mères, début juillet pour aller à la plage… Un certain Joseph en a fait l’expérience. Le site s’adressait même à lui au féminin, tant le formatage est fort.

Le journaliste Patrick Wassef montre bien le lien entre le sexisme souterrain et le commerce de ces médecins sur leurs sites minceur. 

« Il faut souffrir pour être belle »… Il faut être belle !?? Cette oppression est l’envers de l’obsession de minceur comme ces féministes le montrent (https://www.infokiosques.net/IMG/pdf/Oppression_Et_Liberation_De_La_Grosseur.pdf

Conclusion : les femmes doivent se soucier de leur ligne.

Le professeur Tounian avait bien touché du doigt le gagne-pain mais il s’arrêtait au seuil des raisons profondes, tout au moins en ce qui concerne les femmes, public visiblement privilégié puisque Joseph est féminisé par le site de coaching en ligne

Un autre site http://duketik.blogspot.fr nous apprend beaucoup de choses sur le fonctionnement en interne d’un site minceur. La formation des chargés de clientèle serait un point à mettre en lumière par l’expertise. Puisque le prétexte de certains médecins est qu’il leur est impossible de répondre à la demande (sic) en consultations, les sites y répondent… mais les imagine-t on derrière chaque écran prenant Joseph en charge ? 

En France, le PNNS actuel s’achève en 2015. Très bonne occasion pour que le prochain mette sous son égide ce travail d’enquête.

La nôtre, d’enquête, arrive à son terme… la diffusion de la bonne nouvelle en ce qui concerne le surpoids n’a pas besoin d’attendre plus longtemps… Inutile de se faire maigrir, et souffrir, en engraissant les sites minceur, enfin, ceux qui en profitent. Et sortons de l’édredon certains scandales !

Pour le bien de tous, partagez au plus vite…

Catherine Grangeard






9 commentaires:

  1. Un des effets des injonctions paradoxales, c'est la confusion de pensée que ça produit en nous.C'est une des qualités de cet article que de dénouer ces fils et de nous montrer l'envers de certains décors. En marketting, la " façade " est essentielle.
    On a bien compris la marchandisation de nos corps, côté obésité ou côté minceur: il est difficile d'y échapper. On a ici d'ailleurs une excellente illustration de l'emprise comformiste médiatisée de plus en plus présente. Le coaching, dont le ressort majeur est la simplification des problèmes et des solutions pour aboutir à une réponse comportementale, ce coaching a de beaux jours devant lui.
    Si la figure du médecin comporte encore un halo d'idéalisation( il nous protégerait de la maladie et de la mort...), l'article de Catherine Grangeard a le mérite de nous dévoiler certaines verités.
    Indignez-vous, n'est ce pas son message?

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  2. Bonjour,
    Il est amusant de voir, au delà des controverses concernant cette étude, que Madame Grangeard s'occupe de patients qui vont subir une chirurgie bariatrique, chirurgie éminemment contestable et contestée.
    Les problèmes de poids (et de cachexie) dans les pays développés sont liés au consumérisme qui permet de se gaver et de se priver (cf. la signification de la nourriture dans les religions) tout en enrichissant les gaveurs et les régimeurs.
    Ce billet est à mon sens trop affirmatif et cela mériterait des développements beaucoup plus longs.
    Bien à vous.

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    1. OK... billet à développer ! La chirurgie de l'obésité est complexe, les recommandations HAS montrent qu'il ne s'agit pas d'opérer pour réussir... La préparation et le suivi sont les temps forts mais... certains (patients et chirurgiens) veulent l'ignorer. En l'an 2000, le chirurgien Patrick Bergevin est venu pour me dire "le bistouri a besoin du divan" et depuis 15 ans nous essayons, avec la même diététicienne, Aurélie Thomas, d'expliquer tout cela à des personnes qui sont en obésité massive et qui croyaient qu'une chirurgie et tout allait se résoudre, par miracle. "Y a- t- il quelqu'un dans ce corps ?", c'est le titre de la communication que j'ai faite au Congrès de la SOFFCO, à Lyon cette année. Et qu'un congrès de chirurgiens donne la parole à une psychanalyste, c'est pas banal... Bien sûr que ces chirurgies ne concernent pas qu'un estomac, un intestin ! La personne a son histoire, singulière. Ici comme ailleurs, s'intéresser au comment sans creuser le pourquoi c'est réducteur et dangereux... Et, tout à fait d'accord avec vous pour dénoncer et alerter...

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  3. Bonjour,
    Critiquer le marché du surpoids, pourquoi pas ?
    Mais je vous trouve scientifiquement un peu légère.
    Sans parler des conflits d’intérêts qui sont insuffisamment explorés. Comme ceux de Patrick Tounian, que vous citez comme référence, et qui a de multiples conflits d’intérêts avec l’industrie agro-alimentaire, http://www.vegactu.com/actualite/patrick-tounian-dans-femina-ou-lexemple-parfait-du-conflit-dinteret-7407/ http://www.clicanoo.re/?page=archive.consulter&id_article=447350 et dont les théories peuvent se résumer à : »il n’y a pas de mauvais aliments » et « l’obésité est une maladie génétique » http://www.clicanoo.re/?page=archive.consulter&id_article=447350 .
    Vous devriez annoncer vous-même vos conflits d’intérêts, puisqu’il semble que vous travailliez auprès de patients obèses dans une clinique privée, la clinique Lacanienne à Beynes, dans le 78, et que vous avez donc tout intérêt à ce que vos patientes soient satisfaites de vos services, même si elles n’ont pas perdu un gramme suite à vos prestations. Donc, des patients sortant de chez vous, non seulement déculpabilisées, ce qui est une chose, mais aussi désinformées, ce qui en est une autre.

    Sur la légèreté de votre approche scientifique je trouve que vous passez bien vite sur l’analyse de l’étude de Flégal sur laquelle vous fondez votre approche très optimistes des problèmes de santé liés à l’obésité: apparemment, cette étude va dans le sens de vos théories, cela vous convient donc, alors ce n’est pas la peine d’essayer d’analyser de quelle manière on est arrivé à ces conclusions étonnantes, même si cette étude semble aller à contre-sens de tout ce qu’on avait déjà démontré dans le domaine des effets de l’obésité sur la santé.
    D’après votre compte-rendu de cette étude une femme de 1,65m pourrait peser 95 kg (IMC=35), et cela améliorerait tout de même son espérance de vie par rapport à une femme de poids normal, c'est-à-dire pesant de 54 à 68 kg (IMC de 20 à 25). Vous dites : » Katherine Flegal montre aussi qu’une réduction de 5% demeure pour celles qui ont un IMC de 30 à 35, qui sont donc en obésité modérée par rapport aux personnes en IMC normal… »
    Outre que le risque de mortalité n’est pas le seul inconvénient à considérer lorsqu’on est obèse, parce qu’il y a une influence sur la qualité de vie dans son ensemble (risque accru de pathologies cardiovasculaires, d’arthrose, de douleurs articulaires, d’essoufflements…), les résultats de cette étude sont à prendre avec des pincettes.
    Quelques notions sur l’analyse d’études
    Il s’agit d’une méta-analyse, ce type d’étude est très difficile à analyser et interpréter car il s’agit de mettre ensemble des choux et des carottes et d’en tirer des conclusions valables de manière générale. Cela veut donc dire qu’on va regrouper des études dont la population étudiée, les méthodes d’analyse varient beaucoup d’une étude à l’autre.
    La première difficulté vient de la qualité des études. Elle est visiblement généralement mauvaise pour ce type d’études, puisque avec des critères assez minimalistes et mal définis de sélection ( les reviewers se sont mis d’accord pour sélectionner les études),la méta-analyse ne retient que très peu sur l’ensemble de celles répertoriées, moins de 2%. Premier constat : la qualité des études est mauvaise.
    La deuxième est qu’ un bon critère pour savoir si ces études peuvent être ainsi regroupées, est la mesure de leur hétérogénéité : plus les études sont hétérogènes, plus c’est une mauvaise idée de les regrouper pour en tirer des conclusions globales. Cette hétérogénéité est définie par I2 (i au carré). Elle peut varier de 0%, c'est-à-dire études parfaitement homogènes, à 100% études complètement hétérogènes. Vous remarquerez que, pour la plupart des critères, cette hétérogénéité tourne autour de 90% (tableau 1). Donc, deuxième constat : mauvaise idée de regrouper des études aussi hétérogènes. Cela nécessite de nombreux ajustements, contrôles, pouvant être chacun source d’erreurs supplémentaires.
    ...

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  4. SUITE
    La troisième critique est de ne pas prendre en compte l’effet du tabagisme, le tabagisme étant une cause majeure de mortalité prématurée, et tendant à être inversement corrélé au surpoids (on peut supposer que les gens qui se savent en surpoids ou obèses essayent d’éviter un facteur de risque supplémentaire et ne fument donc pas) http://www.researchgate.net/publication/236165156_The_Obesity_Paradox_-_and_commentary_on_the_Flegal_JAMA_Study . L’étude citée critique aussi l’emploi de l’IMC comme variable évaluant le risque, mais c’est moins gênant quand on évalue des rapports et des tendances.
    Quatrièmement, dans l’étude de Flegal, on peut critiquer l’emploi du hazard ratio ou risque instantané. Celui-ci dépend à la fois de la date de fin de l’étude et ne donne pas d’information sur le nombre de décès cumulés. On peut donner l’exemple de 100 personne suivies pendant 10 ans. Un certain nombre de personnes meurt chaque année. Pour les besoins de l’exemple ce nombre approche chaque années 10% des survivants. A la fin, la moyenne des hazard ratio sera 0,1 ou 10%, pourtant toutes les personnes seront mortes. Le choix ce cet indicateur semble un peu inévitable, compte tenu de l’hétérogénéité des études, mais il induit fortement en erreur sur la tendance réelle de la mortalité.
    Cinquièmement, l’IMC pris comme référence est très large et va de 18,5 à 24,9. Or, on sait que des faibles IMC en dessous de 20 s’accompagnent aussi d’un risque accru de mortalité.


    Une autre étude, moins citée et plus récente, s’est fondée sur le suivi depuis 1982 et pendant 28 ans d’une cohorte américaine de 891 000 blancs et 38 000 noirs dont la moyenne d’âge était de 57 ans au début de l’étude et dont 434 000 sont décédés à la fin de l’étude http://www.plosone.org/article/fetchObject.action?uri=info:doi/10.1371/journal.pone.0109153&representation=PDF .
    Si je dois résumer les conclusions de cette étude, elle sont que la préexitence d’une maladie chronique, ou bien le fait de fumer ou d’avoir fumé, modifient la relation entre l’indice de masse corporelle de référence choisi, entre 22,5 et 24,9, et le risque de décès. Mais pour une personne ne souffrant pas de maladie chronique et non tabagique ou ex tabagique la relation entre l’indice de masse corporel et la mortalité est très clair.
    Pour les non fumeurs, non malades, hommes ou femmes il existe une relation très claire entre l’IMC et la mortalité (tableau 3) et celui-ci commence à partir du surpoids. Le risque pour l’ensemble de la pop suivie non fumeuse non malade, est par exemple augmenté de 9% pour un IMC compris entre 25 et 27,4, de 39% entre 30 et 34,9, et de 79% entre 35 et 39,9, par rapport aux personnes ayant un IMC compris entre 22,5 et 24,9. Le risque de décès augmente aussi en dessous de 20 d’IMC.
    Ce risque de décès augmenté en fonction de l’IMC se retrouve chez les personnes âgées de moins de 69 ans au début de l’étude, mais pas chez les personnes de plus de 70 ans.
    Par contre la relation entre IMC et risque de décès est atténuée en cas de tabagisme et de maladie prévalente.
    Ce qu’on peut traduire, non par être en surpoids ou modérément obèse n’a pas d’influence sur le risque de décès, mais par : « lorsque vous êtes fumeur il y a des bonnes chances que la cigarette vous tue indépendamment de votre poids » et « lorsque les pathologies sont déjà présentes les bénéfices sur la mortalité de la normalisation de poids sont moins importants » .

    Par contre, les bénéfices d’une normalisation du poids pour un non fumeur non malade en termes de risque de mortalité, sont tout à fait clairs.

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  5. Mauvais renseignements... je ne travaille pas dans une clinique, et Clinique Lacanienne est le nom d'une revue de psychanalyse. Son intitulé "clinique" montre que les textes publiés traitent de "clinique",opposée à de la théorie. je suis effectivement une des rares psychanalystes à m'intéresser aux personnes obèses et à chercher à comprendre l'obésité. J'ai donc été invitée à y publier... bénévolement :)
    Je suis une correspondante de plusieurs chirurgiens de l'obésité dans les Yvelines, et ce depuis l'an 2000. Les personnes consultant pour une chirurgie sont reçues dans des cabinets, extérieurs aux hôpitaux (privés et publics) car elles sont à recevoir comme des personnes et pas seulement comme des patient-es momentanément concerné-es par une chirurgie. Ce projet va changer leur rapport à la nourriture, au corps, etc... C'est donc important de considérer tout cela et pas seulement les kilos à perdre.

    Le professeur Tounian est cité dans l'article ci-dessus non à titre de modèle mais parce qu'il donnait son avis sur le silence autour de l'étude de Dr Katherine Flegal.
    Je pense, comme vous, qu'il est tout à fait intéressant de travailler cette méga-analyse. Mais... Il faut déjà en parler...
    la fabrication du "fléau de l'obésité" est un sujet qui mérite que l'on se penche dessus. Je suis absolument convaincue !
    C'est l'objectif de mon article qui vous a fait réagir, et je vous en remercie.
    Publier des articles permet de poser les problèmes. pas forcément de les résoudre, en ce même lieu.
    "Comment maigrir" semble bien plus attirer les foules que "pourquoi"... Ce n'est peut-être pas un hasard.
    A suivre, effectivement !

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  6. D’où je parle ? Qui suis-je ?
    La question étant revenue à plusieurs reprises, dans les commentaires du premier billet, il est donc nécessaire d’en comprendre les raisons. Peut-être que je me suis insuffisamment présentée…
    En premier lieu, j’ai une expérience de psychanalyste et de psychosociologue.
    Depuis l’an 2000, l’obésité est devenue un centre d’intérêt capital.
    Peu de psychanalystes s’intéressent à ce qui préoccupe pourtant une bonne partie de nos concitoyens. Cela me paraît être une raison suffisante !

    Une première rencontre est déterminante.
    « Le bistouri a besoin du divan »… le chirurgien Patrick Bergevin s’adresse à moi car il sait que les patients qui viennent le voir pour une chirurgie de l’obésité ont aussi un souci à régler avec eux- même pour que l’aide de la chirurgie soit efficace. Son intuition l’amène à constituer une équipe composée d’une diététicienne et d’une psychanalyste, qui reçoivent chacune dans leurs cabinets respectifs, car il s’agit de personnes et pas seulement de patients concernés à un temps T par une chirurgie de l’obésité. Cette décision est déterminante dans notre approche des personnes.
    Un soir par mois, cette équipe propose aux candidats à la chirurgie (gratuitement) une réunion d’informations où d’anciens opérés se joignent pour échanger sur leurs expériences et proposer des activités (rando, bourse aux vêtements, …).
    Dans cette équipe, d’une clinique privée pourtant, nous sommes des passionnés !

    Je suis également devenue correspondante d’hôpitaux publics dans les Yvelines, là où se trouve mon cabinet. Il n’y a pas de clivages Public/privé mais plutôt certains chirurgiens sont investis et d’autres moins…
    Je participe, depuis de longues années aussi, au REPOP, réseau de prévention de l’obésité pédiatrique, où l’idée de proximité du patient regroupe des médecins généralistes, pédiatres, diététiciennes et psychologues. Ici, le principe c’est d’être proche du patient et de sortir de l’hôpital… C’est un accompagnement pluridisciplinaire.

    Deuxième rencontre déterminante.
    En novembre 2010, le rapport ANSES sur la nocivité de tous les régimes… Nous le savions déjà mais voilà que ce rapport sera opposable à tous. Ainsi, combattre les remèdes miracle et s’affronter aux gourous sera facilité.
    C’est un tournant dans ma pratique.
    Je prends contact avec Jean-Michel Lecerf qui a présidé le rapport. Nous faisons connaissance. Il m’invite à intervenir dans des congrès qu’il organise. Je cesse de ne fréquenter que des chirurgiens… dans ce monde de l’obésité ;)
    En 2012, je lui propose de créer un Think Tank Obésités, pluridisciplinaire. Il sera question de réfléchir et en 2013 un blog ouvre sur le net.
    Le Think Tank Obésités n’a rien à vendre, aucune formation à quiconque, à la différence d’autres groupes de réflexion. Le financement des professionnels de la communication qui s’occupent de l’aspect technique du blog est réalisé par les Thermes de Brides Les Bains, dont Jean-Michel Lecerf est conseiller scientifique. Les membres sont cooptés, sur proposition des uns et des autres. C’est un collectif. L’idée était de ne pas débattre en arrière- boutique mais d’énoncer sur le blog nos points de vue, y compris nos divergences. En 2015, un grave conflit surgit… Le Think Tank y survivra- t- il ? (à ce jour, 4 août 2015, nul ne le sait). De ce Think Tank, néanmoins, une profusion de réflexions aura émergé. Du grave conflit, aussi…

    Troisième temps
    Des sites- minceur fondés par des médecins vendent sur internet des programmes, formules, etc… Ils le font dans un vide juridique total. Parce qu’ils sont présentés avec une caution de médecins, le public a confiance. C’est révoltant…
    Voilà le temps présent…
    Une expertise, à l’identique du rapport ANSES ci-dessus cité, est nécessaire. Qu’elle soit sous l’égide du prochain PNNS (celui-ci s’achève en 2015) semble réalisable.
    A suivre…
    (en annexe, liste de mes publications).

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  7. Grangeard Catherine
    - 2005, Le seigneur des anneaux, avec Dr Patrick Bergevin, enfance et psy 27, pp 86-96
    - 2005, Vers une approche globale de la personne, idem, Le médecin des Yvelines, 38, pp 8, 9
    - 2007, Obésités
    Le poids des mots, les maux du poids, Calmann Lévy, Paris.
    - 2007, Le poids des représentations : transfert et contre-transfert en chirurgie bariatrique. Obésité 4, pp 318-324
    - 2008 L’obésité et la grossesse, Agora 11, pp 16-25
    - 2008 Grossesse et Obésité : sens et contre-sens psychiques pour la patiente et pour le médecin, Médecine Thérapeutique, Société de Médecine de la Reproduction, vol 10, n°3, pp 195-203
    - 2008 Obésité mentale ? , La clinique lacanienne 13, pp 129-147
    - 2008 Savoir dire non, Obésité 13 , N° 3, pp 151-154
    - 2009 Poids et gourmandise, Souffles, N° 194, pp 27-32
    - 2009, Etre un jeune en surpoids , SSPP, Université Paris 12 et Conseil Général Val de Marne, 24, Juillet 2009, pp 10,11.
    - 2010, Le cas d’une famille unie par les liens du poids, avec la diététicienne Nelly Levert. Nutrition, 14, pp 40,41.
    - 2011, Vers une psychanalyse de l’obésité, La Clinique Lacanienne, 18, pp 141,150.
    - 2011, Le suivi en chirurgie de l’obésité, Obésité, volume 6, N°1, mars 2011, pp 29,32.
    - Avril 2012 : Comprendre l’obésité. Une question de personne, un problème de société. Ed Albin Michel
    - Novembre 2012, Edito de la lettre de la nutrition, n° 12, Thermes de Brides-les-Bains.
    - Janvier 2013, La chute du régime, Santé mentale, n°174, Dossier : un autre regard sur l’obésité, pp 21,81.
    - 2013, Dictionnaire International de la Psychanalyse, ss dir Alain de Mijolla ; (dans le cadre de l’actualisation, introduction de l’item : Obésité.)
    - 2013, La faim des régimes, vol XVI, n°2, MHDN (Métabolismes, Hormones, Diabètes et Nutrition), dossier ss dir Jean-Michel Lecerf, pp 12, 16.
    - 2013, direction du dossier Obésité pour le Journal des Psychologues, n° 311, octobre.
    - 2014, l’obésité des adolescents, livre collectif (ed Albin Michel)
    - 2014, Ecouter l’obésité. Actes du Congrès Espace Analytique, (ed Erès)
    - 2015, Tous les corps sont différents, tout le monde est donc normal, Causette, Août, Hors-série « Tous manipulés ? », pp 64,65.
    - 2015, Le corps et la tête… mais où est la personne ? Pratiques en Nutrition, (n°43, juillet-septembre 2015). pp….

    Pour retrouvés tous les billets parus http://catherinegrangeard.blogspot.fr/
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  8. Bonjour, j'ai une remarque/question/commentaire.

    Je suis en surpoids : 95 kg pour 1m70.

    Face à un médecin, c'est systématique : sérénade sur le nombre de kg que je DOIS perdre, sous peine de mourir à 28 ans dans les 6 mois (j'exagère à peine)

    Je suis partie en Allemagne pour voir leur programme sur l'asthme (qui, non ne vient pas du fait que je suis en surpoids, comme on me le serine souvent mais est de naissance, et à l'époque, j'étais plus en sous poids qu'en surpoids !). J'y ai croisée une médecin, qui au lieu de calculer mon IMC et calculer combien de kg je DOIS perdre m'a fait mettre de profil et mesuré ma graisse abdominale. Elle m'a dit que le problème n'étant pas tant le chiffre sur la balance (mais qu'il fallait qu'il ne grimpe pas plus quand même) mais le fait que ma graisse soit principalement située sur mon ventre et donc fatigue plus mes organes que si elle était plus répartie ou dans mes cuisses.
    Que donc ce que je devais perdre c'était cette graisse sur le ventre.

    Déjà ça fait un peu du bien de ne pas être juste une formule de math à la con.
    Question maintenant, a-t-elle raison ? la "localisation" du surpoids est-elle vraiment à ce point là importante ?
    Et si oui, pourquoi est-ce qu'on ne le dit pas ?

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