lundi 26 juin 2023

Vaccination contre les HPV - En 2023, que faire ?

Un collègue généraliste m'écrit  : 


J'ai lu ta préface dans "La piqûre de trop". 

Quelle est l’actualité de la vaccination contre les HPV ? 

Que dire à nos patients-tes ?


Voici ce que je lui ai répondu. 

*

Les arguments scientifiques (je veux dire : connus grâce aux chercheurs indépendants, en dehors de la propagande des industriels) 

1° Les bénéfices de la vaccination contre les HPV en termes de nombre de morts par cancer ne sont pas connus exactement. On sait que ça prévient des infections, mais est-ce que ça fait diminuer le nombre de morts par cancer ? On  n'en sait rien. Il faudra encore plusieurs décennies pour le savoir.

Ici aussi j'insiste sur le terme "morts par cancer", qui n'est pas synonyme d' "infections par les HPV". 

S'il y avait autant de cancers que d'infections par le HPV, la vaccination serait indiscutable. Mais ce n'est pas le cas : l'immense majorité des infections par HPV (plus de 90%) guérissent sans séquelles et ne provoquent pas de cancer. Ce qui veut dire que quand on vaccine, on prévient surtout des infections bénignes... 

Certains chercheurs avancent par conséquent que, comme un certain nombre d'infections par les HPV guérissent seules, les effets "bénéfiques" du vaccin sont probablement surestimés.

2° La tendance à la baisse de la fréquence des cancers est directement corrélée au niveau socio-économique du pays considéré : plus le pays est riche et plus le dépistage y est développé, plus la baisse est nette et constante. Comme vaccination et dépistage sont indissociables (aucun pays ne se contente de vacciner sans dépister), impossible de dire si la vaccination est le facteur déterminant de cette baisse ou un de ses facteurs. 

3° Les accidents vaccinaux sont peu nombreux (ça, on le sait). 

Mais est-ce que ça justifie de vacciner systématiquement "parce que ça ne peut pas faire de mal" ? Non. 

Ici, j'insiste sur le mot systématiquement. 
Dans mon esprit cela signifie qu'une vaccination obligatoire de tous les enfants, imposée par les pouvoirs publics, n'est pas justifiée, alors qu'elle l'est pour la polio, la diphtérie, le tétanos, et les autres maladies transmissibles qui représentent un danger immédiat ou quasi-certain. 

Une infection par le poliovirus, impossible à prévenir par d'autres méthodes que la vaccination, est mortelle ou invalidante dans de très nombreux cas. 

Une infection par les HPV n'est jamais un danger immédiat. Même quand on a été vaccinée, le dépistage est la seule manière d'identifier un cancer du col à son début pour le traiter

4° L'intérêt de la vaccination des garçons contre les HPV est très hypothétique étant donné le faible nombre (et la fréquence rare) de cancers qui les concernent. (Voir questions et réponses après l'article.) 

5° L'argument de la "prévention du cancer du col des femmes par la vaccination des garçons" n'a jamais été démontré. 

C'est un argument culpabilisant, non un argument de santé publique. 

Les HPV peuvent être transmis entre filles avant l'âge des rapports sexuels (et avant d'avoir été vaccinées...) ; par ailleurs, on n'a pas encore démontré (et c'est pas demain la veille) qu'un garçon vacciné ne pourra jamais transmettre un HPV. 
En effet, vous savez, depuis la COVID, qu'on peut parfaitement contracter un virus après avoir été vacciné... et le transmettre sans avoir de symptômes. 

6° Enfin, la vaccination contre les HPV a un coût collectif qui n'est pas négligeable, et ce coût pourrait être affecté à d'autres nécessités de santé (en particulier celui de permettre l'accès au dépistage pour les femmes qui ne consultent jamais, le plus souvent pour des raisons socio-économiques : femmes migrantes, femmes immigrantes, femmes sans ressources, etc...). 


A titre informatif, il n'est pas inutile de consulter le panorama officiel des cancers en France entre 2010 et 2018

Qu'est-ce qu'on y apprend ? 
a) Le cancer du col n'est pas du tout aussi fréquent ni grave qu'on veut vous le faire croire :  
- cancer du col : 2900 cas en 2018, et 1100 décès
- cancer de l'ovaire 5 200 cas en 2018 et 3500 décès 
- cancer du sein58 000 cas en 2018, et 12000 décès 

b) Le cancer du col et les cancers ORL (dus aux papillomavirus) chez l'homme ne sont même pas répertoriés parmi les principales causes de décès par cancer !!! 
 

Mais il n'y a pas de "vaccin contre le cancer" du sein, du côlon, du poumon, qui sont beaucoup plus fréquents... 

On est donc devant cette situation intéressante : le cancer du col est un des cancers les moins fréquents et les moins mortels pour les femmes et il peut être facilement dépisté tôt et traité (et le taux de guérison est élevé) 

MAIS 

il est aussi celui qui fait l'objet de la campagne de prévention la plus lourde et de la promotion d'un "vaccin préventif" des plus profitables pour l'industrie, sans bénéfice démontré pour la population dans son ensemble.
 


Alors, quand on me pose la question, je réponds :  

1° Si vous décidez de vacciner vos filles, ne vous culpabilisez pas : vous ne leur faites pas courir de danger, mais sachez que la "sécurité" que vous leur apportez face au cancer du col est inconnue et impossible à mesurer à l'heure actuelle. Or, c'est ce (faux) sentiment de sécurité et de protection qu'on vous vend, en vous incitant à vacciner vos filles (et vos garçons). 


2° si vous ne les faites pas vacciner, ne vous culpabilisez pas non plus : vous n'êtes pas TENUES, médicalement parlant, de leur imposer une vaccination de plus, pour une maladie qui peut être dépistée puis traitée sans vaccination (grâce au frottis à partir de 25 ans et au diagnostic des HPV à trente ans, très fiable) ; 

3° en même temps que vous pouvez leur faciliter l'information sur la contraception à partir du moment où elles commencent à avoir une activité sexuelle, suggérez-leur de lire tout ce qu'elles peuvent sur le sujet du cancer du col ; le rôle de votre médecin ou de votre sage-femme est aussi de vous (de leur) donner accès à toutes les infos disponibles ; 

4° envisagez de laisser vos filles choisir elles-mêmes de se faire vacciner, ou non contre les HPV. Après tout, vous n'allez pas décider pour elle de leurs grossesses futures. Ce que vous voulez, c'est qu'elles prennent leurs décisions elles-mêmes, dans leur propre intérêt. N'est-ce pas ? 


Lorsqu'elles seront assez âgées pour décider d'avoir des relations sexuelles et (par exemple) de garder ou non une grossesse, elles seront aussi assez âgées pour décider de se vacciner (et elles ont le temps de le faire). 

D'un point de vue médical (et parental), ne pas se comporter en directeur de conscience, et donner aux personnes qui nous font confiance les outils pour choisir de manière autonome, c'est l'attitude la plus éthique. Et, à long terme, la plus "protectrice". 

Pourquoi ? Parce que la peur, la menace ou la contrainte ne permettent jamais de prendre des décisions bénéfiques pour notre santé. 
 
Martin Winckler/Dr Marc Zaffran

10 commentaires:

  1. Bonsoir, merci pour votre article. Je ne comprends pas une chose. C'est autant les garçons que les filles qui sont concernés. Voir plus les garçons car chez eux la détection est inexistante. Je me questionne en effet comme vous sur la vaccination des femmes et je comprends le manque de recherche mais pour les garçons en revanche je me dis que c'est une aubaine pour ne pas contracter le virus et let aux filles (en cas de rapport hétérosexuel).

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    1. Encore une fois, je me place sous l'angle de la vaccination *systématique* de TOUS les enfants (filles et garçons). Est-ce que ça apporte quelque chose aux garçons de les vacciner ? Ca n'a pas été démontré.
      Les tenants de la vaccination avancent que ça évitera des cancers ORL, de l'anus et du pénis chez les garçons, mais c'est une hypothèse non démontrée : ces cancers sont rares et multifactoriels (tabac et alcool pour les premiers, autres infections transmissibles comme l'herpès pour les autres) ; les HPV ne sont donc pas les seuls facteurs. Est-ce que ça apporte quelque chose aux filles de vacciner les garçons ? Ce n'est pas démontré car... c'est impossible à démontrer.
      Donc, à mon avis, le choix de la vaccination doit rester individuel puisque ses bénéfices en terme de santé publique sont inconnus, voire discutables. Quand on consacre des millions d'euros à une vaccination systématique pour un bénéfice futur hypothétique, ces millions ne peuvent pas servir pour soigner des maladies actuelles et démontrées.

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  2. Merci pour votre réponse. J'entends la nuance concernant la vaccination systématique. A titre individuel je pense vacciner mon fils. J'ai peur qu'il attrape et transmette à son tour. Vue mon histoire personnelle je préfère le prémunir. En revanche je crois savoir que le vaccin ne couvre que quelque HPV et pas tous.

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    1. C'est tout à fait exact. Il y a plusieurs dizaines de HPV et une poignée seulement sont couverts par la vaccination.

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  3. Merci beaucoup pour votre avis éclairé. Ca rend bien service !

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  4. Merci beaucoup pour cet éclairage !

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  5. Bonjour, je me permets de rebondir sur le sujet de la vaccination en vous citant :
    " Parce que la peur, la menace ou la contrainte ne permettent jamais de prendre des décisions bénéfiques pour notre santé. "
    Je trouve que cela illustre très bien ce que l'on a vécu avec la campagne de vaccination COVID...

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  6. Bonsoir, pourquoi recommande-t-on le vaccin dès 11ans alors que les enfants peuvent avoir des relations plus tard ? Est-ce par anticipation oui est-ce parce que plus les enfants sont vaccinés jeunes plus les effets sont bénéfiques ?

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    1. Ca a été instauré lors de la première campagne de vaccination. Sur les recommandations des industriels. Et pour justifier les rappels ultérieurs. Et en précisant qu'on pouvait vacciner plus tard. La recommandation aujourd'hui est : UN seul vaccin est valable très longtemps. Peut-être pour la vie entière.... Donc l'âge du vaccin est extensible. Si on est très inquiet(e), on peut envisager la vaccination avant la puberté. Si on ne l'est pas, on peut attendre que son enfant la demande quand elle a l'âge de se préoccuper d'une contraception... Ou plus tard, si elle a envie de réfléchir.

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  7. Bonjour, il semble bien que les anglais aient constaté une diminution documentée des cas de cancers du col de l’utérus depuis la vaccination anti HPV : https://www.who.int/europe/fr/news/item/29-04-2022-hpv-vaccination-brings-the-who-european-region-closer-to-a-cervical-cancer-free-future#:~:text=En%20Angleterre%20(Royaume%2DUni),de%2012%20ou%2013%20ans).

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